Les livres de Jean-Philippe Querton

Jean-Philippe Querton est descendant d’Elie Meurs d’Ecaussinnes. Grand amateur de littérature policière et amoureux des mots, comme il l’avoue lui-même, s’est lancé dans l’aventure littéraire il y a quelques années. Il a créé un personnage de détective privé, Marcel Quinchon, porté sur le pastis et la Chimay bleue, amateur de cassoulet et autres petits plats bien mitonnés, consommateur impénitent de cigarettes blondes… Vous l’avez compris, nous avons affaire à un personnage bien de notre époque, hédoniste sans remords, avec la bonne dose de narcissisme qui l’accompagne, et le cynisme indispensable à la protection du petit bonheur toujours menacé par la condition humaine (la santé, c’est fragile), par la nature humaine (l’imbécillité et la méchanceté sont fort répandues) et par la société (menée par le fric, le sexe et le mensonge). Un personnage pas vraiment sympathique au premier abord, jusqu’à ce qu’on découvre ses bons côtés… Car si Quinchon est un philosophe pragmatique, « je m’en-foutiste », – puisque « No future », alors « Carpe diem » tant qu’on peut -, il ne peut s’empêcher de piocher dans le romantisme : la vie n’est pas pur néant, il y quelques perles fines qui valent la peine : certaines amitiés, les coups de cœur en littérature et en gastronomie. Un personnage complexe, donc.

Jean-Philippe a exercé le métier de restaurateur, et cela se reflète jusque dans les titres de ses livres. « Poulet aux olives » est un « polar gastronomique », et le héros n’oublie pas de prendre son apéritif favori et de dorloter son estomac. Quelques grands moments de son enquête se passent dans des restaurants, à Lillois comme en Bretagne. Dans « Mortelle praline », il flirte avec les thèmes de la boulimie et de l’anorexie, de la malbouffe et du Mac Do.

Dans le premier, l’intrigue fait remonter à la surface des faits qui se sont déroulés pendant la seconde guerre, opposant résistants et collaborateurs à l’intérieur d’une même famille, à Rebecq. Le décor est fait de bibliothèques, de librairies et d’archives. Dans le second, il découvre, contre son gré, le milieu hospitalier (le Tivoli), et de fil en aiguille, il fréquente le monde du football à La Louvière et celui de la pègre italienne dans les milieux de la construction. La sexualité est omniprésente et ce qui est décrit est souvent de l’ordre du trivial, car les aventures sexuelles de Marcel Quinchon le conduise régulièrement à la déception. On ne peut pas dire que ce sont de grands moments de l’enquête, même si la quête de la vérité passe par là. Mais il est vrai que les véritables éblouissements amoureux sont un jardin secret que l’on garde pour soi. Ceux-là, Marcel Quinchon signale simplement qu’ils existent. Cela fait penser un peu à San Antonio, qui fait coexister deux mondes étanches : celui de l’extérieur (tous des pourris, toutes des salopes) et celui de Félicie (sa maman, innocente et foncièrement bonne). Marcel Quinchon a lui aussi son havre de pureté : une fermette du côté du bois de la Houssière à Braine-le-Comte, et la famille de ses propriétaires et voisins, Chloé, William, et surtout le petit Martin, un gamin futé dont il se fait complice de tous les caprices.

L’un des plaisirs de ma lecture est venu de ma connaissance des lieux. Dans « Le Poulet aux olives », Nivelles avec la rue du Géant, la rue de Bruxelles et la Grand-Place ; la place de la gare à Lillois, la campagne de Rebecq, Ronquières et Braine-le-Comte ; la place de la Ronce à Ecaussinnes-Lalaing. Dans « Mortelle Praline », qui se déroule à La Louvière, on se souvient des embrouilles dans le milieu du foot et surtout des magouilles des négriers de la construction.

Si on souhaite avant tout dévorer une histoire corsée, on risque d’être déçu : les considérations philosophiques ou littéraires de Marcel Quinchon ramollissent le scénario. On est habitué aujourd’hui à des récits plus nerveux. Par contre, on prend plaisir à l’écriture, qui cultive les jeux de mots, les formules brillantes, la dérision, les calembours, les références littéraires et culturelles. Avec une tendance à la cascade d’équivalences. Si je peux me permettre une métaphore gastronomique, c’est parfois copieux, avec une sauce un peu trop riche. Mais l’essentiel est là : le plaisir.

Dans un tout autre genre, mais avec les mêmes obsessions poussées à l’extrême, Jean-Philippe Querton a encore écrit « L’homme à la Chimay Bleue », un roman noir, voire noir de noir, mais contrairement au chocolat, ce n’est pas mon goût préféré. Un homme renonce à prolonger sa vie au prix d’une médecine qui impose traitements et restrictions ; il décide de se « suicider » à la « Chimay bleue » et planifie froidement ses derniers mois d’existence. C’est compter sans une rencontre qui réveille des souvenirs douloureux et ravive un instinct paternel qu’il avait volontairement éteint. Le héros passablement misanthrope, mais il a ses raisons, débouche sur des sentiments de vengeance puis de honte ; mais il éprouve surtout de la sympathie et de la compassion pour une jeune fille dont la vie est brisée par l’imbécillité de jeunes coqs pourris gâtés. C’est une lente et impitoyable descente aux enfers qui laisse un goût amer quand on referme enfin ce livre où les éclaircies sont rares.

La diffusion d’un livre est, hélas, souvent difficile. Aussi, pour se procurer les livres de Jean-Philippe, vous pouvez vous adresse directement à l’auteur par courriel : jeanphilippe_querton#yahoo.fr (Remplacer le # par @).

Pour en savoir plus, voyez aussi l’article dans ce même n° de Piret Magazine où il se présente lui-même, ainsi que ses livres parus. Vous trouverez à la fin les points de vente de son livre, ainsi que les projets de publications pour 2008. Vous pouvez aussi taper son nom sur le moteur de recherche Google, et vous aurez accès à une mini biographie.

Jean-François Meurs