Les cavaliers de l’an mille


Une mise en scène romanesque de nos ancêtres

Le lien qui rattache la généalogie MEURS aux rois de France, ouvre des perspectives très vastes en matière de généalogie, car des liens multiples nous relient à toutes les grandes familles de France : les comtes de Blois, d’Anjou, de Champagne, de Flandre, de Hainaut et de Brabant, de Normandie et d’Aquitaine, d’Angleterre, de Savoie, d’Alsace et de Bourgogne, de Hollande. J’ai eu un jour la curiosité de remonter les filières : on trouve une multitude de recoupements qui vont dans tous les sens, et ce n’est pas étonnant, puisque les unions matrimoniales faisaient partie des politiques d’expansion et de paix, des jeux d’alliances pour équilibrer les forces ou agrandir son prestige.

Du coup, on peut lire les livres d’Histoire et aussi certains romans « historiques » avec une curiosité renouvelée : comment les auteurs parlent-ils de nos ancêtres, quels caractères leur sont attribués, quels rôles leur fait-on jouer ? Que deviennent-ils dans l’imaginaire d’un romancier qui a toute liberté pour combler les lacunes de l’historien ?

J’ai voulu essayer avec une saga qui fait revivre les années qui précèdent et suivent l’an mille et utilise comme personnages principaux Hugues Capet, fondateur de la dynastie des rois de France, et son épouse Adélaïde d’Aquitaine, fille de Guillaume Tête d’étoupe.

Le héros de l’épopée est fictif : un certain Loup, petit Seigneur vivant au bord de la Loire entre Blois et Tours, qui se met au service d’Hugues Capet, souvent chargé de mission par Bouchard, le rusé conseiller du roi. Il voyagera à travers l’ex-Empire de Charlemagne, pour rencontrer le roi Lothaire, les empereurs Otton 1er et Otton II ; allant jusqu’à Rome, avec des aventures au passage des Alpes…

Certains de nos ancêtres sont à peine cités dans l’un ou l’autre épisode : Foulques d’Anjou, réputé cruel et ambitieux, prêt à rogner ce qu’il peut de la Bretagne. Arnoul le vieux et Arnoul le jeune, comtes de Flandre, qui ont dérobé Montreuil-sur-mer au comte d’Artois.

D’autres interviennent de façon plus étoffée. C’est le cas des frères Lambert, fils du comte de Hainaut, dépouillés de leurs domaines par l’empereur Otton, et que Hugues Capet va aider à rentrer en possession de leurs titres. On évoque à ce propos le siège de Mons. Ils sont un peu sots, surtout le plus jeune, Lambert, futur comte de Louvain, ancêtre des ducs de Brabant. Rainier, qui deviendra comte de Hainaut, comprend plus vite où se situe son intérêt et agira avec davantage de sagesse.

Enfin, certains deviennent des personnages bien incarnés, avec leur caractère et leurs actes. Hugues Capet, bien sûr, pas très porté à l’étude et à se cultiver dans sa jeunesse, mais passionné de chasse et fougueux. Une fois devenu Duc des Francs, il s’assagit, et vit une véritable histoire d’amour avec son épouse, Adélaïde d’Aquitaine, une femme qui sait tenir son rang et qui sait ce qu’elle veut.

Mais celui qui fait la grandeur d’Hugues Capet, c’est Bouchard le Vénérable, comte de Vendôme, redoutablement intelligent, tortueux, dénué de scrupules quand il s’agit de la raison d’état. Il n’hésite pas à mettre la vie de ses amis en danger pour mener sa politique. C’est lui qui manipule l’échiquier de toute l’Europe. Bien que contrefait, il plaît aux femmes. Il est aussi notre ancêtre, puisque sa fille Elisabeth épouse Foulques d’Anjou…

Un autre de nos ancêtres est bien campé et joue un rôle important, même si c’est le rôle du mauvais : le comte Thibaud de Blois, surnommé dans l’histoire « Thibaud le tricheur ». Le romancier ne se prive pas de lui attribuer tous les défauts, la tricherie, bien sûr, mais aussi la fourberie, la cruauté, l’âpreté à l’argent, la débauche… avec un reste d’honneur lié à la conception de la chevalerie. Son épouse Liégard de Vermandois s’en tire mieux une fois son époux disparu, et elle devient au contraire une alliée de Loup, notre héros. Son fils Eudes, de qui nous descendons, sera lui aussi un partisan de Loup.

La trame du récit respecte de très près la réalité historique, et intègre même des documents écrits authentiques. Les conditions de vie de l’époque, bien décrites par des historiens spécialisés, sont bien utilisées et tout à fait respectées. J’ai des doutes en ce qui concerne la reconstitution du vocabulaire. Mais l’Histoire laisse suffisamment de blancs pour laisser l’imagination de l’auteur développer des histoires. Avec beaucoup d’intrigues sentimentales et de batailles…

Marcel-Louis Perrier, Les Cavaliers de l’an mille : « Le Secret des forges » (les années 946-976), éditions du Valhermeil, 2003 ; « Les deniers de Quentovic » (976-983), éditions du millénaire, 2006. A paraître : « L’énigme du sacre ». Si quelqu’un le souhaite, je peux lui prêter mes exemplaires…

Jean-François Meurs